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On confond parfois les nanotechnologies avec les biotechnologies. Les unes et les autres se situent au niveau de la mol�cule et souvent de l’atome. Mais les biotechnologies concernent le vivant, tandis que les nanotechnologies s’int�ressent plut�t aux mat�riaux et aux machines - diff�rences qui n’emp�che pas d’ailleurs leur coop�ration dans un nombre de plus en plus grand d’applications. Avec les nanotechnologies, on travaille � l’�chelle du nanom�tre, c’est-�-dire du milliardi�me de m�tre. Une mol�cule d’ADN mesure quelques nanom�tres, un atome (par exemple de silicium) quelques dixi�mes de nanom�tre. A ces �chelles, les lois de la physique ne sont plus celles de notre monde mat�riel (macroscopique) mais celles du monde quantique. Retenons seulement que les concepts d’atomes, d’�lectron, de proton ou m�me de mol�cules, couramment utilis�es dans le vocabulaire des nanotechnologies, ne correspondent pas � ce que l’on entend dans le vocabulaire courant. Ainsi, une particule quantique ne peut pas �tre localis�e simultan�ment en position et en vitesse (principe d’ind�termination d’Heisenberg). Il s’agit en fait d’un syst�me quantique que l’on d�signera du terme de particule par commodit�, mais qui, pour �tre manipul�, exigera le formalisme math�matique et les instruments propres � la m�canique quantique. On ne parlera plus alors d’une particule bien d�finie mais d’�tats probabilistes. Malgr� ces difficult�s, depuis les ann�es
1980, de nombreux laboratoires ont commenc� � travailler
� ces niveaux atomiques et subatomiques. Le microscope �
effet tunnel, invent� en 1982, a permis de d�placer les
� atomes �, afin de les recombiner en formes nouvelles de
mat�riaux et de machines. Aujourd’hui, de nombreux dispositifs
utilisant les lasers, les champs magn�tiques, les synth�ses
chimiques, permettent d’intervenir au niveau des mol�cules
et des atomes et de modifier leurs relations. Ceci se fait aussi bien
dans la cellule vivante, dont on comprend ainsi mieux les m�canismes
intimes, que sur des compos�s inertes. Avec les nanosciences et les nanotechnologies, la difficult� est de distinguer ce qui rel�ve encore de l’exp�rimentation, voire de la science-fiction, et ce que donne lieu d’ores et d�j� � des applications prometteuses. Par ailleurs, les r�f�rences constantes au monde quantique, dont la connaissance est encore tr�s peu vulgaris�e, ne facilitent pas l’approche. Cependant l’effort d’une mise � niveau minimum doit �tre fait par tous les d�cideurs et les responsables politiques. Les nanosciences sont une des clefs majeures pour comprendre le monde en train de s’�difier, et le r�le qu’y jouent les grandes puissances scientifiques.
Nous ne pouvons ici en dire plus ici concernant les techniques
et les instruments qui sous-tendent le d�veloppement des nanosciences.
Pr�cisons seulement qu’il s’agit dor�navant
de mettre en place de vastes plates-formes technologiques o� les
diff�rentes sciences se conjuguent, avec des moyens puissants de
recherche fondamentale et d’exploration. L’investissement
est de taille nationale, sinon (pour ce qui concerne nos pays) de taille
europ�enne. Il impose en tous cas des r�seaux d’excellence
indispensable � la productivit� des recherches. D�j� en œuvre ou en cours de d�veloppement � un horizon de dix ans, les grandes applications des nanotechnologies concernent : - La r�alisation de composants �lectroniques de plus en plus miniaturis�s et de haute densit�. Pour les informaticiens, les microsyst�mes et circuits int�gr�s travaillant � l’�chelle du micron, puis de quelques centaines et bient�t de quelques dizaines de nanom�tres, offrent des performances remarquables en mati�re de consommation d’�nergie, vitesse, d�gagement de chaleur et co�ts. Ils sont indispensables dans les calculateurs modernes comme dans les mobiles de toutes sortes qui se r�pandent dans la soci�t�. La marche vers le nanom�trique pourra se poursuivre quelques ann�es encore, jusqu’� ce que le niveau quantique soit atteint et rende inop�rant les processus dits du � silicium �, actuellement utilis�s pour la r�alisation des composants. Mais, � ce stade, les nanotechnologies offrent l’espoir de solutions, avec l’ordinateur quantique e, �ventuellement, l’ordinateur � ADN. Ce domaine est absolument fondamental. Si l’Europe y d�pendait de l’�tranger comme elle d�pend actuellement des am�ricains dans le domaine des calculateurs et les logiciels, s’en serait fait d�finitivement de ses ambitions �conomiques et politiques. - La recherche bio-m�dicale. Le secteur est en pleine expansion. En attendant les nano-particules et nano-machines (voir ci-dessous) qui circuleront dans le corps humain pour y apporter des vaccins et m�dicaments, les nanotechnologies ont d�j� de nombreuses applications int�ressant la biologie et la sant�. Citons la fabrication de marqueurs mol�culaires pour d�terminer les g�nes actifs dans telle ou telle situation et y adapter des m�dicaments ; l’analyse rapide de l’ADN � partir de bio-puces afin de r�aliser les tests g�n�tiques notamment en vue de la pr�vention des maladies g�n�tiques ou du diagnostic relatif au caract�re malin ou b�nin des cancers. Certains articles pr�sentent cette perspective comme une v�ritable r�volution dans le traitement des tumeurs. Les bio-puces sont des supports inertes o� l’on peut placer des brins d’ADN afin d’�tudier leur appariement avec d’autres brins apport�s � leur contact. Le tout op�re au niveau nanom�trique. On mentionnera aussi les nanomat�riaux utilis�s dans les proth�ses pour faciliter leur insertion dans le corps ou la r�alisation d’agents dits � de contraste � permettant d’affiner l’imagerie m�dicale fonctionnelle, dont on sait les innombrables perspectives, y compris en ce qui concerne la compr�hension du fonctionnement de cerveau. - Les nanomat�riaux et nanomachines. Il s’agit de produire des atomes et des mol�cules de produits n’existant pas � l’�tat naturel dans la nature ou non encore clairement identifi�s dans l’environnement naturel. Ces produits serviront � la plupart des chantiers d’ing�nierie envisageables, que ce soit au niveau macroscopique ou microscopique. On mentionne par exemple les rev�tements pour proth�ses faits de nanoparticules leur permettant de mieux se fixer dans les tissus. Dans l’industrie, on �tudie maintenant les possibilit�s des nanotubes, qui permettront de r�aliser des fibres de tr�s grande taille, d’une l�g�ret� et d’une r�sistance in�gal�e. Elles trouveront usage partout, y compris dans les grands ouvrages d’art. Mais, � une toute autre �chelle, les nanoconstructions permettront d’�laborer des structures et des machines efficaces � l’�chelle du nanom�tre. On parle beaucoup, par exemple, du moteur mol�culaire. Bornons-nous � indiquer un des principes de ceux-ci. Il s’agit d’utiliser l’effet brownien (bombardement d’une mol�cule par des photons) pour la faire tourner. Un dispositif laser retient les particules qui poussent la mol�cule dans le sens de la rotation, et freinent celles qui poussent en sens contraire. C’est l’effet dit � cliquet �. Ces recherches ont par ailleurs l’int�r�t de faire mieux comprendre ce qui se passe au sein des cellules vivantes, notamment pour mod�liser leurs actions motrices. - Les supramol�cules. On sait que, dans les corps vivants, les mol�cules vitales telles les hormones s’organisent par liaison chimique dite faible (contrairement aux atomes des cristaux, par exemple, qui sont li�s entre eux par des liaisons fortes ou covalentes). La chimie supramol�culaire �tudie ces organisations, r�sultant de l’interaction de groupes donneurs ou accepteurs d’�lectrons. Les mol�cules ayant plusieurs possibilit�s de liaison supramol�culaires sont dot�es de la propri�t� dite de l’auto-organisation, propre � la vie. Avec les nanotechnologies est apparue la possibilit� de susciter des auto-organisations artificielles, selon des architectures choisies en fonction des r�sultats attendus. Le processus une fois engag� se poursuit spontan�ment (r�plication) pouvant aboutir � la production d’un tr�s grand nombre d’�l�ments. Les voies classiques de la synth�se mol�culaire, toujours lentes, sont ainsi remplac�es par des possibilit�s de production en masse, s’inspirant du vivant. On obtient ainsi � des prix raisonnables une vari�t� infinie de composants de base, de type biologique ou inorganique, pouvant servir � de multiples usages : calcul informatique, interventions th�rapeutiques, r�alisation de nouveaux mat�riaux et produits chimiques. Il est �vident en contrepartie que les facult�s d’auto-reproduction de telles entit�s, qui les assimilent � des virus, exigeront un minimum de pr�cautions afin qu’ils ne s’�chappent pas dans leur environnement. Aujourd’hui, la r�alisation de telles � usines mol�culaires � ne s’envisage encore qu’en laboratoire.
Dans les pays qui, comme les Etats-Unis et le Japon, consid�rent
les divers aspects des nanotechnologies comme un enjeu de pouvoir militaire
ou �conomique � d�ployer dans leurs zones g�ographiques
d’influence, les recherches et la production de nano-objets b�n�ficient
d’une vision et d’une strat�gie globale ainsi que de
moyens tr�s importants en chercheurs et en cr�dits. - L’emploi. Il est ind�niable que les sites de production industrielle traditionnels, que ce soit en mat�riaux inertes ou en produits organique et pharmaceutique, devront laisser place � des plates-formes de production dot�es d’�quipements infiniment plus complexes et co�teux. Il faudra donc sans attendre pr�parer la transition. Cela ne se fera pas sans conflits, les vieilles industries m�tallurgiques, chimiques et pharmaceutiques employant beaucoup de monde qu’il faudra reconvertir. Il est certain qu’en contrepartie, comme d’autres technologies avanc�es, des emplois, notamment qualifi�s et tr�s qualifi�s, pourront �tre cr�es. Par ailleurs, elles auront un effet d�multiplicateur d’activit�s dans tous les secteurs o� elles apporteront de nouveaux outils et produits. Encore faudra-t-il adapter � cette fin l’appareil universitaire et de formation. - La croissance. Au plan de la croissance, les retomb�es seront ind�niablement importantes, pour les pays qui auront su se placer dans le peloton de t�te. Mais dans l’imm�diat, il faut investir, sans retour sur investissement imm�diatement pr�visible. Les investissements peuvent �tre extr�mement co�teux. Nous pensons par exemple aux plates-formes de production des puces de toutes sortes. Il faut compter 5 milliards d'euros l'unit� pour traiter des tranches de silicium de 300 mm, qui sont dor�navant la r�gle. Ceci explique bien des concentrations pr�visibles, dont souffriront les salari�s des petites unit�s mais qui paraissent indispensables. D’o� la n�cessit�, en Europe, de regroupements d’entreprises. Il ne faut pas oublier non plus que les investissements des pays ayant d�j� perdu certaines guerres technologiques (comme celle des composants pour ce qui nous concerne) devront d’une fa�on ou d’une autre �tre prot�g�s, sauf � laisser s’accro�tre ind�finiment notre d�pendance. Ajoutons que, dans les diff�rents domaines pr�sent�s ici, la recherche publique fondamentale doit jouer un r�le consid�rable, vu la nature des recherches � mener (haute scientificit�, peu de rentabilit� imm�diate, caract�re strat�gique). Mais il faudra aussi int�resser les entreprises petites et moyennes aux nombreuses retomb�es imm�diatement valorisables. Les applications militaires, en mati�re de nanotechnologies, sont extr�mement nombreuses. Comme dans les autres secteurs strat�giques, elles joueront un r�le de locomotive. L’Europe ne devra pas s’en priver. - La gestion des risques. En France, l’opinion, mal inform�e de la consistance exacte des risques, commence � se mobiliser sur les investissements int�ressant les nanotechnologies, telle la plateforme Minatec � Grenoble. Nous pensons que les risques aujourd’hui sont faibles ou nuls, tant du moins que l’on prendra, comme en microbiologie ou dans le nucl�aire, les pr�cautions qui s’imposent. Cependant, il ne faut pas nier � terme les risques inh�rents � ces nouvelles technologies: par exemple les risques de maladies pulmonaires li�es � l’absorption des nanofibres, ou la possibilit� de r�plication non-contr�l�e de mol�cules auto-organisatrices... Il faut d�s maintenant prendre l’habitude d’�voquer ces risques, sans en faire des �pouvantails, afin d’�viter les campagnes mal intentionn�es.
On voit le caract�re strat�gique des nanosciences, qui seront � la source d'applications nouvelles civiles et militaires dans les secteurs de l’informatique, de la sant�, du spatial, des mat�riaux, de l'�nergie, des transports ou de l'environnement. Les Etats-Unis et le Japon ont d�j� pris
pleinement conscience de cet enjeu. Les Etats-Unis financent depuis 1999
la National Nanotechnology Initiative avec 700 millions de dollars en
2003. La Grande Bretagne pour sa part vient �galement de lancer
un grand programme d�di� aux nanosciences. Cependant, une mission de scientifiques am�ricains a analys� d�but 2002 le potentiel des laboratoires europ�ens dans les nanotechnologies et en a conclu que l'�cart entre l'Europe et les USA se creusait au profit de ces derniers. En France, le panorama est encore moins satisfaisant, ce qui tient d’une fa�on g�n�rale � l’ignorance, par les d�cideurs comme par les �lecteurs, de l’existence m�me des nanosciences et de leurs enjeux. Il s’ensuit un nouveau et ind�niable retard fran�ais, constat� par le S�nat lui-m�me lors d’une s�ance consacr�e � la pr�sentation des nanotechnologies le 23 janvier 2003. Des efforts ont �t� faits mais restent faibles et dispers�s. L’effet de seuil semble encore loin d’�tre atteint. Cependant, le paradoxe est que la France est d�j� tr�s pr�sente dans le domaine de la micro-�lectronique, aussi bien dans la recherche � travers le CEA-LETI et de nombreux laboratoires universitaires, que dans l'industrie via l’entreprise italo-fran�aise ST Microelectronics, sans oublier des PMI, par exemple Soitec � Grenoble. Le pr�c�dent gouvernement, relay� par l’actuel, avait n�anmoins compris que la France devait renforcer ces points d’excellence, afin de ne pas rester � la tra�ne en Europe. En 2003, a �t� lanc� un nouveau programme national "Nanosciences", avec un financement de l'ordre de 12 millions d’euros, associant les partenaires cit�s ci-dessus, auxquels doivent s'ajouter l'INSERM et la D�l�gation G�n�rale � l'Armement. Les th�mes retenus dans l'appel � projets de recherche concernent les objets individuels et composants �l�mentaires, l'information quantique, l'organisation et l'assemblage de nano-objets ainsi que les architectures de circuits, les nanomat�riaux et les nano-bio-sciences. Une part du financement servira � la constitution de r�seaux d'excellence ou � la pr�paration de projets int�gr�s europ�ens. On peut rappeler par ailleurs que, dans le cadre du partenariat
entre la recherche publique et l'industrie, les Minist�res en charge
de la recherche et de l'industrie ont cr�� d�s 1999
le "R�seau Micro et Nano Technologies � (RMNT) qui soutient
des projets coop�ratifs entre industriels et laboratoires de recherche
publics. L'ensemble des activit�s du r�seau, associe chercheurs
et industriels, qui participent au Comit� de Coordination avec
les repr�sentants des minist�res, de l'ANVAR et de la DGA.
Depuis son lancement, 51 projets ont �t� labellis�s,
sur 120 d�pos�s par 300 partenaires diff�rents, dont
de nombreuses PME. Cela repr�sente un soutien total de 42 Millions
d’euros financ�s sur 4 ans par les Minist�res de la
Recherche, de l'Industrie et l'ANVAR. La moiti� de ces projets
environ concerne les nanostructures, les nanomat�riaux et la nano�lectronique.
L'ann�e 2002 a �t� consacr�e � l'�laboration
d'un livre blanc destin� � pr�ciser la d�limitation
du domaine industriel, scientifique et technique, afin de d�finir
le positionnement du RMNT, ses objectifs et sa strat�gie. Les sites de Grenoble (CEA-LETI ) qui h�berge le p�le Minatec et la f�d�ration d'unit�s mixtes de recherche, associant le CNRS, l'Institut National Polytechnique de Grenoble et l'Universit� Joseph Fourier), de Lille (IEMN), de Toulouse (LAAS) et de Paris-Sud (IEF et LPN)(6) ont �t� choisis. L'ensemble de ces sites repr�sente un effectif proche d'un millier de personnes, chercheurs, ing�nieurs, techniciens et administratifs, qui poss�dent la comp�tence et l'expertise n�cessaire(7). A c�t� du r�seau de grandes Centrales Technologiques, huit centrales dites sp�cifiques, dot�es d'�quipements plus classiques ou d'outils particuliers, viennent compl�ter le dispositif. Localis�es pour certaines sur deux sites, elles sont situ�es � Grenoble, Lyon, Marseille, Montpellier, Limoges-Bordeaux, Rennes, Nancy-Strasbourg et Besan�on. En r�capitulant ces diverses actions et les budgets qui leur sont consacr�s en 2003, on arrive � 50 millions d'euros pour le minist�re de la Recherche, auxquels on ajoutera le programme national "Nanosciences" f�d�r� par la Direction de la Recherche (12 millions d'euros), le r�seau des quatre centrales technologiques pilot� par la Direction de la Technologie (30 millions d'euros), l'irrigation vers les PMI du programme "R�seau Micro- Nano-Technologies" (8 millions d'euros) soit un total d’environ 100 millions d’euros, � rapprocher des 700 millions de dollars en 2003 de la National Nanotechnology Initiative am�ricaine (qui est loin de couvrir toutes les d�penses consenties dans le domaine par les diverses agences concern�es). Bien qu’honorable, la position de la France n’est pas, selon nous, � la hauteur de la comp�tition internationale. Diff�rentes raisons peuvent l’expliquer. Nous n’en mentionnerons qu’une, hors le manque de prise de conscience des enjeux par les d�cideurs et les hommes politiques en g�n�ral : la relative dispersion des laboratoires et des chercheurs, ainsi que celle de la difficult� de mener des carri�res interdisciplinaires dans le cadre acad�mique, carri�res qui s’imposent dans des recherches qui conjuguent la physique, la biologie et l’informatique. Pour compl�ter ou actualiser les donn�es
pr�c�dentes, on pourra consulter sur le web :
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