Loïc Lorent - Nonoland
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Présentation par l'auteur :
France. Hiver 43-44.
Autour de Pierre, un pays esclave et des personnages
qui « luttent » au nom de sacro-saintes idées. Des
idées et des drapeaux. Des drapeaux que l’on confond, parfois.
Pierre doit s’engager. C’est ce qu’on lui répète.
L’Engagement. Milice, FTP, Allemands .
Alors il va devoir choisir, parce qu’il le faut, parce que son frère
est un « héros » (c’est ce qu’on répète,
encore), parce qu’au fond, choisir c’est réaliser pleinement
son non-engagement.
Il prend les armes et se prend au jeu, insipide s’il n’y avait
le sang et un certain regard, celui d’une femme.
Et dans ce coin d’une France (d’une civilisation)
qui s’effondre sous les coups du manichéisme et au son des
fanfares militaires, Pierre apprend le métier d’homme.
Pendant ce temps, les dieux de pacotille, eux, sont morts.
Extrait :
Elle aurait dû tomber plus tôt. La France,
leur France. Ça meurt, ça s'effondre, c'est pire que tous
les déclins imaginés dans les beaux salons parisiens. Bon
Dieu, ça leur pendait au nez comme une évidence. Ils l'ont
vu arriver. Et tous d'attendre, le crêpe noir déjà
au bras. Nous mourrons en eunuques.
Un vieux pays, peuplé de vieux malades. À tout prendre,
l'achever était peut-être une bonne chose. Malgré
les rodomontades de nos politiciens mises en premières pages des
journaux, cela n'avait pu étonner que les idéalistes ou
les fous…
Pas visionnaire, oh non. Suffisait d'observer. Les nations, ça
tombe comme les hommes. Ça commence par perdre la tête, ça
oublie son histoire, ses amis, ses promesses. On vous moque, on ne vous
prend plus au sérieux. Vous pouvez encore faire peur, mais c'est
une peur mêlée de ricanements. Après la tête,
les muscles. Une maladie, voilà tout. Tout engourdi. Ça
met des heures à réagir, ça tergiverse et, finalement,
quand ça se décide à frapper… un soufflet,
à peine.
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